Record historique : 40 millions d’Européens sont en situation de sous-emploi, c’est-à-dire exclus d’un emploi à temps plein. Face à une politique de l’offre qui plonge la France et l’Europe dans la dépression, la clé de la sortie de crise réside dans le coût du capital. Quatre raisons principales en font le fauteur, le prolongateur, et l’accompagnateur de la crise économique. Sortir de cette dernière par le haut impose de tirer le coût du capital vers le bas.
1°) Valeur ajoutée : le capital rafle la part du lion
La part de la valeur ajoutée (c’est-à-dire des richesses produites par le travail) que s’approprie le capital ne cesse d’augmenter. Il comprime les salaires, l’investissement, les contributions fiscales. Les entreprises françaises distribuent aujourd’hui 7 fois plus de dividendes qu’il y a 20 ans (9% de la valeur ajoutée, record depuis la seconde Guerre mondiale). Outre cette accumulation de capital débordante, les entreprises imposent au contribuables de financer leurs taux de profits : les grandes entreprises bénéficient annuellement de plus de 30 milliards € d’exonérations de cotisations sociales et 172 de niches fiscales. Bref, ce nouveau cadre financier contribue à l’explosion de la part du capital dans le revenu national (de 25 % en 1980 à 35 % en 2010).
2°) Le capital alimente la rente et paralyse l’investissement
Le coût du capital s’exprime par deux autres biais, fortement dégressifs (qui touchent plus les petites que les grandes entreprises). Tout d’abord, les actifs immobiliers, dont la hausse des prix à la location prend à la gorge de nombreuses PME. Ces dernières transfèrent leurs gains de productivité directement aux propriétaires dont la rente lucrative s’accroît, au lieu de les investir économiquement. Ensuite, l’inflation des taux de crédit (liée à la construction oligopolistique du marché bancaire) auxquels sont soumises les entreprises. Elle détourne la valeur ajoutée des entreprises vers les créanciers, et empêche, par ses obligations de retours sur « investissement », la mise en place de nombreux projets économiques utiles, sociaux, écologiques, rentables… dont la rentabilité demeure inférieure à 10 %!
3°) Le capital contre l’emploi
Conséquence de cette ponction grandissante du capital sur la valeur créée par les salariés : consommation basse, crédit cher, investissement en berne, indicateurs de gestion orientés vers le rendement à court terme… aussi les plans sociaux se multiplient-ils. Dernier exemple, Alcatel-Lucent, qui annonce la suppression de 20% des effectifs français (900 postes). Les salariés paient au prix fort les erreurs de dirigeants obsédés par la création de valeur actionnariale à court-terme, au mépris de la stratégie industrielle et de la recherche technologique.
4°) Le capital contre l’environnement
Le système capitaliste fonde en outre une logique extractiviste, productiviste et consumériste qui a pour résultat l’épuisement des ressources naturelles, la destruction de la biodiversité, le dérèglement climatique, la pollution de l’air, de l’eau et des sols, l’extension des transports de biens. Ces dégradations menacent la possibilité même d’une vie sur terre.
Face à cela, nous proposons l’écosocialisme, prolongement de la dimension internationale de la lutte anti-capitaliste dans la revendication universelle d’une planète vivable pour tous les êtres vivants. Il implique de revoir nos choix de production et de consommation énergétique, de rechercher des filières vertes, de repenser l’agriculture, d’organiser le transfert modal en privilégiant le fret ferroviaire et fluvial, d’imaginer la reconversion de notre outil industriel et de refuser la publicité et l’obsolescence programmée. Bref, mener une déflation vigoureuse du capital.
Notre ambition consiste à replacer la question du capital, son coût, son allocation, son appropriation, au centre du jeu politique. Deux axes y président : abaisser son coût pour définanciariser l’économie (reconquérir le marché intérieur, relancer la recherche et développement, réorienter l’épargne nationale vers les investissements productifs et les besoins sociaux) ; socialiser le capital, via des outils fiscaux (« révolution fiscale ») permettant d’élargir l’assiette d’imposition des revenus du capital, et des outils juridiques (« socialisation progressive ») permettant à plus long terme d’assurer un renversement de la propriété etun véritable pouvoir des salariés, exercé sous le contrôle de la Nation. Enfin l’enjeu démocratique dépasse le strict cadre des entreprises et rejoint l’urgence démocratique, devant l’émergence d’une société de rentiers, où l’héritage remplace le mérite, où les champs politiques et médiatiques sont captés par des fraudeurs et des corrompus aux patrimoines exorbitants.